" /> Joueur de Jazz moscovite. - Côteaux de la Boivre

Côteaux de la Boivre

Chroniques des Marches

Joueur de Jazz moscovite.

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(Lu sur Telegram par le traducteur inconnu qui m'a envoyé ce texte.)
« Les gens quittent la Russie.
Ils ne s'enfuient plus en panique, comme aux premiers jours avec des valises faites à la hâte, mais ils partent préparés et conscients.

Aujourd'hui, j'ai parlé à Oleg I., un musicien d'Ingibeats et mon batteur depuis le tout début de ma carrière musicale. Oleg m'a raconté comment il a transhumé jusqu'en Géorgie avec trois valises de la taille d'une camionnette, des caisses contenant des équipements et des instruments, trois chiens, dont l'un pesait 50 kg, et trois chats, des minibus et des jeeps.
La Géorgie (ses douaniers) les a interrogés longuement de manière biaisée. Au point qu'Oleg transpirait et que les gardes-frontières ont ouvert les fenêtres. Oleg a ri, il semble qu’il puait comme une mouffette. Il n'avait pas pris de douche depuis trois jours.

Je lui demande ce qui l'a poussé à partir. Je lui demande, car je sais qu'Oleg n'est pas un activiste politique et qu'il n'était pas en danger.
Il dit que le village de Vnoukovo, où ils ont vécu, est une petite commune où tout le monde se connaît. Et puis quelqu'un a lu le post anti-guerre d'Oleg. C'était comme « non à la guerre", rien de plus.
(Нет войне) Le lendemain, ils ont cessé de dire bonjour à Oleg dans l’épicerie du coin et les parents d'un garçon à qui Oleg a enseigné la batterie ont interdit à leur fils d'aller aux cours.

Oleg dit que lui et sa femme ont commencé à se sentir comme des traîtres et des ennemis parmi leurs gentils voisins d'hier. Ils ont cessé de sortir dans la rue : c'est devenu non seulement inconfortable, mais même dangereux.

Je l'ai écouté et j'ai pensé.
Tout cet exil russe d’aujourd'hui, un exil vraiment massif, comparable par sa taille, son caractère et sa qualité uniquement à la première période révolutionnaire ; et tous ces gens disent la même chose :

  • Nous retournerons en Russie lorsque le régime tombera.

Le régime va tomber, sans aucun doute.
Mais que dire de nos compatriotes gavés de fascisme, non pas 83 % comme on nous fait croire, mais la moitié à coup sûr. Pour vous donner une idée plus claire de leur nombre, je dirai simplement qu'il y en a un sur deux. Mets-toi bien ça dans la tête.

Et donc, faisons comme si le régime était tombé, vous rentrez dans votre pays avec vos chiens et vos chats, vous arrivez à Vnoukovo, et là, dans la boutique, derrière le comptoir, se trouve la même vendeuse et les parents d'un jeune batteur.

Comment faites-vous pour les gérer ?

  • Prendre l’air de rien ? Ou bien les cogner ?
  • Les prendre en pitié ? Pardonner ?

Ou tu veux leur mettre une putain de claque dans la poire ? Juste comme ça. Comme s'il n'y avait rien d'autre à faire. Parce qu'il y a des nuages dans le ciel et que mon humeur n'est pas si pourrie.

C'est à ça que je pense quand je pense à l'avenir.
Et je n'ai pas la moindre idée d'une réponse cohérente. »
I.G.